INFRA BLEU

2021

Résidence de création arts/sciences autour des enjeux du littoral et du carbone bleu.

Le littoral héberge des milieux étonnants, parfois méconnus, qui ont des capacités d’absorption du dioxyde de carbone extraordinaire. Cette puissance invisible, cette richesse, entre mer et terre, entre sédiments et algues, autant que leur fragilité nourriront le travail plastique des artistes.

Pour cette recherche j’ai élaboré une nouvelle dynamique de travail avec une matière extraordinaire : le limon. En recherchant la transparence, et les jeux de matière avec elle je me suis plongé dans la beauté inhérente à cet élément si décrié. Chaque pièce devenait une image satellite d’un littoral, ou une vision aérienne de nuages.

Dans le même axe, j’ai cherché dans les algues, la lumière, et à reproduire cette transparence légère qu’elles ont sous la mer.

Les partenaires :

  • Laboratoire LIENSs

  • Université de La Rochelle

  • Musées de la Ville de La Rochelle

  • Astre

  • Région Nouvelle-Aquitaine

  • Drac Nouvelle-Aquitaine

  • Hôpital Marius Lacroix

Extrait du texte curatorial Sortie de Terrain de Mathilde Walker–Billaud

Paysage “en voie lactée”

“ Le travail plastique de Duvignaud a été guidé par la condition invisible des marais. Il a mis au cœur de son geste plastique la vase et les algues, ces dépôts naturels envahissant les plages du littoral, considérés le plus souvent comme encombrants, malodorants et repoussants.

Aujourd’hui, alors que les industries agro-alimentaire et pharmaceutique promeuvent les bienfaits de ces produits dérivés de la mer et des marais, ce sont ces matériaux pauvres et périssables qui sont à l’avant-garde des catastrophes écologiques. Subissant de plein fouet les effets de la production industrielle mondialisée et la pollution, la faune et la flore du littoral se dérèglent parfois dangereusement jusqu’à devenir toxiques pour les hommes. Et c’est cette confrontation entre les hommes et l’écotone marin, un territoire en mouvement pris entre la mer et la terre, que le plasticien Duvignaud a voulu mettre en scène dans ses toiles. Chaque œuvre de la série War In Ecotone naît d’un dialogue avec la matière : d’abord un jet de boue ou un dépôt d’algues volumineux sur du verre, suivi d’un glissement lent de ces éléments sableux et boueux sur cette surface solide et lisse, et enfin la sédimentation de ces dépôts naturels dans du pigment bleu industriel. Chaque toile rejoue une scène de rencontre entre différents acteurs du territoire côtier, et rend compte des chocs (souvent imperceptibles à l’échelle d’une vie humaine) entre les activités humaines et non-humaines au niveau de l’écotone marin.

Plus qu’un enregistrement statique du balancement des eaux sur le rivage, chaque pièce matérialise le cycle long, processuel et accidentel de la sédimentation marine. De près, on note tout un ensemble de points, de sillons et de spirales, des écoulements et des infiltrations marquant le passage, la percolation de l’eau dans la vase. Révélées par la main de Duvignaud, qui dans son processus de pigmentation crée un contraste entre le bleu et le sable boueux, ces traînées composent un réseau de filaments vaporeux et fragiles, en mouvement. Elles évoquent les photographies télescopiques de la galaxie, où flottent des nuages de gaz, de poussière et de débris. Ces nébuleuses picturales nous rappellent aussi le rôle majeur des forces extérieures (cosmiques et mécaniques) dans le mouvement des marées. La toile devient une image d’observation multidimensionnelle, à la fois hydrographique et atmosphérique, matérialiste et abstraite. C’est une représentation alternative du territoire des estuaires où les marais – ces “zones blanches”, ces non-lieux des cartes touristiques – s’animent enfin. “

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1 IMMEUBLE, 1 OEUVRE

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